Patrick Grainville (Le Figaro, 24 septembre 1999) Lexotisme de la banquise « Comme souvent dans le roman contemporain, le résumé de lintrigue donne une faible idée de laffaire. Disons quil sagit dun roman daventures doublé dun polar. Ferrer, le héros, en instance de divorce, est un assez beau gosse (on ne le vérifie quà la fin, mais on la deviné tout de suite). Galeriste, il fait dans le post-Duchamp, vend des lubies et des gadgets. Mais cest la crise, les dettes. En filigrane du roman d’aventures, Jean Echenoz dresse un tableau cocasse du milieu de lart. Fric et chiqué, bobards. Ferrer campe un quidam assez grandiose, côté femmes. Il excelle. II ouvre le bec. Elles tombent. Laurence. Victoire, Bérangère, Sonia. Hélène. Les prénoms sont importants car assortis de portraits rapides et suggestifs. Identité bien épinglée. Or, une des réussites du roman tient à cette question de lidentité. Hélène, lultime amante, est difficile à définir par exemple... Mais Delahaye, le collaborateur direct de Ferrer, lui, trimballe une dégaine impayable... Tout cela devrait nous inviter à la méfiance. Cette insistance sur les vêtements, visages... On ne sait jamais. Laventure démarre quand Delahaye, le comparse, informe Ferrer quun navire a fait naufrage sur la banquise quarante ans plus tôt. Il transportait un lot dœuvres inestimables : de lart boréal, paléobaleinier ! Masques, objets, bricoles ruineuses. Ferrer ne fait ni une ni deux, monte une expédition au pôle. On se dit : cest Croc-Blanc qui recommence ! Moby Dick peut-être ou Paul-Emile Victor, à défaut... Mais on sait bien que ce nest pas du tout le genre dEchenoz. Nempêche, on sembarque sur un brise-glace. Et cest farci de détails techniques sur le navire, ses instruments et ses us
