« De même que Dante chemine de cercle en cercle pour atteindre son Enfer ou son Paradis, de même Samuel Beckett situe-t-il, chacun dans un cercle bien distinct, les trois principaux protagonistes des romans de sa trilogie, Molloy, Malone meurt et LInnommable, afin quil atteignent, peut-être, le néant auquel ils aspirent. Dun roman à lautre, ce cercle est de plus en plus réduit. Beaucoup plus à létroit que Molloy, voici donc Malone figé dans une chambre close, gisant quasi immobile dans son lit, attendant sa mort prochaine. Le seul cheminement apparemment possible est celui du regard quil pose sur les objets qui lentourent. Cependant Malone possède un crayon et un cahier : il va écrire. II va décrire son état par le menu, de façon tout à la fois savoureuse et bouleversante, mais aussi il va enfin sexiler de soi vers la périphérie où réside limaginaire : il va pouvoir inventer. Vivre et inventer. (...) vivre, faire vivre, être autrui, en moi, en autrui. ”. Dès lors, ce sont dincessants allers et retours du centre jusquà la circonférence, cet ailleurs où prennent vie les personnages rocambolesques quil crée. “ Et doucement mon petit espace vrombit, à nouveau. Vous me direz que cest dans ma tête, et il me semble souvent en effet que je suis dans une tête, que ces huit, non, ces six parois sont en os massif, mais de là à dire que cest ma tête à moi, non, ça jamais. ” Malone gagne ce domaine périphérique où tantôt il semble sinventer lui-même, tantôt il se métamorphose en lun ou lautre des personnages quil invente. Est-il encore Malone ou serait-il devenu Macmann ? Les limites deviennent floues, la frontière sabolit entre lécrivain Malone et ses personnages, comme aussi, fort subtilement, entre lécrivain Samuel Beckett et Malone, son personnage. Mal
