« Ce qui me fascine dans mon aventure, cest la marche sur le mur entre la vie et les grandes profondeurs annonciatrices de la mort. Cest aussi le souvenir de ces profondeurs. Les réanimés ne se souviennent de rien (de rien, mais de conversations entre les médecins !). La rencontre avec la part de lhomme qui marche, geint ou hurle quand la conscience nest pas là. Jai été conscient de ne plus savoir où jétais -, davoir perdu la terre. Pas dautre douleur que celle des autres, qui bat confusément cette chambre blanche où veille la petite lampe de la nuit comme, dans ma chambre de Bombay, la rumeur de lOcéan battait la grève. Je suis lucide, dune lucidité limitée au ressassement dune terre de nulle part, à la stupéfaction devant cet état ignoré. Ce qui sest passé na rien de commun avec ce que jappelais mourir. » En 1972, André Malraux, « atteint dune maladie du sommeil », est hospitalisé à la Salpêtrière. De cette expérience va naître Lazare, un de ses plus beaux livres, celui quil choisit pour clore le cycle du Miroir des limbes.